CoD : les coulisses d'une usine à succès, itw de Netsabes

Posté par Daffytheduck le 15/04/2014 à 18h34 - Un commentaire ? (4)

Sébastien Delahaye, alias Netsabes, co-fondateur de NoFrag et journaliste chez Canard PC, a récemment consacré un ebook à l'histoire secrète de Call of Duty.

Call of Duty: les coulisses d'une usine à succèsIntitulé "Call of Duty: les coulisses d'une usine à succès: Débauchage, espionnage et traîtrise", l'ouvrage revient sur les origines de la série et son ascension fulgurante.

Une ascension qui ne s'est pas faite sans donner quelques coups, Activision n'a pas hésité à user et à abuser de tous les stratagèmes possibles pour arriver à ses fins.

L'éditeur en a également reçu quelques-uns, de la part même de ses propres troupes alors qu'un climat de méfiance mutuelle s'était peu à peu installé entre lui et Infinity Ward.

Des premières manœuvres d'Acivision pour concurrencer Medal of Honor jusqu'à la fameuse affaire Zampella/West, expliquée en détails, c'est une plongée au cœur d'une véritable guerre de l'ombre au cours de laquelle tout le monde a tenté de tirer son épingle du jeu.

On apprend notamment comment Activision à chercher dés le départ à affaiblir son concurrent EA, comment certains studios se sont cassés les dents sur la série, ou encore comment Infinity Ward à verrouiller toute sa production et commencer à comploter secrètement contre son employeur. Avec de surprenantes anecdotes à la clé.

De quoi porter un autre regard sur Call of Duty et son succès, que l'on soit un adepte de la série ou un passionné du jeu vidéo et de ses coulisses.

 

Nous avons posé quelques questions à Netsabes afin d'avoir son ressenti sur les tensions internes qui peuvent exister dans l'industrie et sur l'avenir de Call of Duty.

La guéguerre de l'ombre à laquelle ont participé Activision, Infinity Ward et EA est elle symptomatique de l'industrie du jeu vidéo aujourd'hui ou n'est ce finalement qu'un cas isolé, résultat de la mégalomanie des dirigeants d'Activision ? Avez-vous été surpris de ces agissements en menant vos recherches ?

Netsabes : Des chamailleries, il y en a tout le temps : dernièrement entre Gearbox et 3D Realms, par exemple. Si la bataille pour Call of Duty ressort plus, ça tient à trois raisons : d'une part, c'est l'une des plus grosses franchises de l'industrie. D'autre part, tout (ou presque) est public et documenté dans les documents des nombreux procès. Enfin, c'est du grand n'importe quoi : entre les patrons qui espionnent leurs employés et les employés qui se révèlent être des serial-comploteurs...

Ceci dit, je ne dirais pas qu'Activision est mégalomane : au contraire, ils ont prouvé être plutôt d'excellents gestionnaires, qui utilisent au mieux leurs ressources et ne se lancent pas dans des investissements trop risqués.

Aujourd'hui, leurs deux principales sources de revenus (Call of Duty et World of Warcraft) ont une dizaine d'années, et sont toujours très rentables. Ça n'est pas un cas unique dans l'industrie (EA a ses franchises de sports, par exemple), mais c'est évidemment enviable. Dans le cas de la bataille pour Call of Duty, ils voyaient clairement Jason West et Vince Zampella comme des obstacles à leur plan. Mais ce serait trop facile de tout mettre sur le dos d'Activision : les ex-Infinity Ward n'étaient depuis longtemps plus loyaux.

 

Activision a pris la décision de passer à un cycle de développement de 3 ans pour Call of Duty avec 3 studios majeurs (Infinity Ward, Treyarch et Sledgehammer Games) afin de continuer à sortir un épisode par an tout en laissant plus de temps aux développeurs. Pensez-vous que cette décision est purement financière ou il y a-t-il finalement quelques considérations créatives derrière ? Après tout, ils auraient très bien pu chercher à sortir deux épisodes par an.

Netsabes : C'est une décision probablement plus technique qu'autre chose : après dix ans sur la même technologie vieillissante, il faut peut-être moderniser tout ça pour les nouvelles consoles.

Ça veut dire apprendre de nouveaux outils, se former à de nouvelles technos... C'était difficile à faire avec le précédent cycle de développement, qui ne laissait guère de temps. Passer à trois studios principaux, ça va leur coûter cher : non seulement chacun des trois gros studios gagne un an de développement (et donc un an de salaires en plus à payer avec un seul jeu), mais ça implique aussi toutes les autres filiales (Treyarch, Raven, High Moon, Neversoft, Freestyle Games, BeachHead...) qui font de la sous-traitance derrière.

Il est tout à fait possible que ça ait des répercussions créatives (on ne fait pas en trois ans le même jeu qu'en deux), mais je doute que ça ait été la motivation principale. Ceci dit, sortir deux CoD par an aurait été risqué (avec notamment un impact négatif certain sur les ventes de DLC, qui sont aujourd'hui l'un des piliers de la franchise), et Activision n'aime pas trop le risque.

 

Peu de jeux ont cherché à concurrencer Call of Duty de front, ou du moins peu en ont eu les capacités. Même Battlefield est à la peine. Aura-t-on un jour un vrai concurrent dans le FPS capable de rivaliser avec Call of Duty en termes de ventes ou l'avance de la marque Call of Duty est-elle trop importante aujourd'hui pour qu'un éditeur envisage simplement de vouloir la rattraper ?

Netsabes : Au contraire, beaucoup de jeux ont tenté de concurrencer les CoD ou les Medal of Honor dans les premières années. Plus personne aujourd'hui ne tente vraiment la concurrence de front, à part Battlefield, mais il reste l'impact culturel du jeu : les FPS militaires contemporains n'ont jamais été aussi nombreux qu'aujourd'hui. Même si Modern Warfare n'a pas inventé le genre, il l'a clairement popularisé.

Pour répondre plus directement, Call of Duty est à un niveau de ventes au moins dix fois supérieur à la plupart de ses concurrents (BF excepté, encore une fois). Dans ces conditions, ça devient difficile de le rattraper. En revanche, les ventes baissent doucement d'année en année, et la concurrence la plus frontale viendra peut-être d'Activision directement, avec Destiny.

 

Pensez-vous que le modèle économique actuel du AAA puisse continuer encore longtemps dans ces conditions avec des budgets de plus en plus énormes, des équipes de développement de plus en plus importantes et une monétisation à outrance des franchises de jeux ? Ne va-t-on pas vers une explosion de ce système à moyen terme ?

Netsabes : Dans le FPS, ce modèle est de plus en plus rare : aujourd'hui, on a des dizaines de petits FPS indés, des tonnes de clones d'Amnesia, plein de free-to-play multijoueurs, mais plus beaucoup de gros AAA.

Le dernier très gros, c'est Destiny : 500 développeurs, c'est monstrueux. En dehors des FPS, qui est un genre saturé, ça reste cependant un modèle économique répandu, et surtout mis en avant tant par les constructeurs de consoles que par les revendeurs : les gros jeux, c'est ce qui motive les gens à acheter des machines ou à venir en boutique.

 

Estimez-vous que Call of Duty est aujourd'hui une locomotive pour le FPS ou au contraire un frein qui empêche son évolution avec des épisodes de plus en plus semblables les uns aux autres ?

Netsabes : Ça a longtemps été un frein, quand tout le monde cherchait à copier CoD, mais aujourd'hui, tout le monde veut faire autre chose. Finalement, ça pousse à plus de diversité chez les AAA. Wolfenstein, Evolve, Destiny, Alien Evolution, Dying Light, Borderlands : à part le probable Battlefield annuel, les gros FPS de cette fin d'année ne visent plus vraiment la même catégorie.

 

Pour ceux qui en ont déjà fait l'acquisition, sachez que l'ouvrage devrait bientôt bénéficier d'une mise à jour.

Les 5 derniers commentaires

FT Roro
Le 21/04/2014 à 17:51
Intéressant :)
Alboss07
Le 15/04/2014 à 21:46
J'attend beaucoup Destiny pendant cette E3 2014 ! Super article et super interview merci Daffy et netsabes !
Oeil de Lynx
Le 15/04/2014 à 19:55
Destiny, c'est le nouveau FPS d'Activision. Il est développé par Bungie, les auteurs de la série Halo et est prévu pour le 9 Septembre de cette année ;)

Comme pour Titanfall, il faudra attendre de voir du gameplay et y jouer pour le juger. Tout le monde est un peu dans l'attente.

Ce jeu va permettre à Activision de développer une nouvelle franchise, afin de diversifier son catalogue de jeu et assurer la pérennité de son entreprise. C'est le but visé mais y parviendront-ils ?
Grizli124
Le 15/04/2014 à 19:16
Il propose dans ses réponses une analyse intéressante, mais c'est quoi au juste Destiny, un futur FPS militaire ? Comment Peut-il dire qu'il aura du succès, si ça se trouve ce sera un jeu pas intéressant comme Titanfall... Ils ont beau mettre 500 développeurs et dépenser des millions dans la promotion du jeu, si le jeu est mauvais, il ne sera pas beaucoup vendu. Un paris risqué d'Activision à mon avis.
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